
Pour ceux qui ne le savaient pas encore,
Renart et moi devions entretenir une correspondance inter-blogues durant le débat sur les accomodements raisonnables. J'ai mis énormément de temps à répondre, parce que c'est le genre d'histoire qui peut facilement dégénérer.
La commission sur les accommodements est un piège à cons. De sa mise en place (créer une commission publique à partir de 3-4 faits divers montés en épingle par les médias de masse c'est malhonnête), jusqu'aux extraits d'audience aux nouvelles(montrer 10 secondes d'une intervention pour en retirer la phrase qui tue, c'est aussi malhonnête), pas besoin d'être un grand conspirationniste pour voir qu'on tente de provoquer les nationalistes durs pour qu'ils se mettent à généraliser à partir de situations, ma foi, futiles, les éloignant encore plus d'une éventuelle base de nouveaux arrivants favorables à un projet de société commun. Quand il nous manque 1% pour aller de l'avant avec un projet de pays, on ne se cherche pas de nouveaux ennemis.
Quand des gens se disant de gauche embarquent dans une tragédie du genre, on commence à être dans la merde. D'ailleurs, pour votre information, partout où la Commission passe, les audiences se passent dans les hôtels ou de grandes salles de conférence. À Montréal, pour la dernière journée, ça se passera au
Local de la fraternité des POLICIERS!!! Vous appelez-pas ça jouer avec le feu, ou s'attendre au pire?!?
Je suis à la fois fils d'immigrant et de Québécoise; je ne veux pas avoir à choisir un camp. De toute façon, il n'y a pas de camp à prendre. On nage dans la démago à fond la caisse; je ne serais pas surpris de voir le KKK et Heritage Front ressortir de leurs cachettes, eux qui faisaient le bordel au début des années 90, à Montréal (eh oui!, ça vous surprend?).
Le Kirpan, le voile, les sandwiches au jambon, les vitres de gymnase teintées. Voyez-vous ici les bases d'un nécessaire débat de société? On avait même pas fini le débat "Lucides/Solidaires", un grand débat de fond sur les "valeurs Québécoises", bordel! Même les commissaires semblent avoir laissé leur jugement dans le placard à la signature des contrats.
Une chose est sûre. Ce sont les fédéralistes qui doivent se délecter. Si les nationalistes décident d'entrer en conflit avec les immigrants: adieu, Pays à la naissance harmonieuse! De source sûre, il serait plus facile d'aller chercher le pourcentage nécessaire à la souveraineté chez nos immigrants francophones que de fédérer les Québécois de souche. Or, vu le nombre de nationalistes qui tombent dans le piège des accomodements, on comprend beaucoup mieux leur incapacité à aller chercher 50%+1 en 40 ans.
Le pire, c'est que, comme nationaliste pur et dur (eh oui!), je ne laisse pas ma place. C'est même à l'indépendance que je crois, pas à un concept galvaudé pour espérer gagner par défaut. Mais mon projet de pays
inclut. Il ne pointe pas les gens du doigt, mais les problèmes. Il n'essaie pas de déresponsabiliser un pour responsabiliser l'autre. Il ne cherche pas de boucs émissaires. Quand quelque chose ne marche pas, je ne regarde pas du côté de l'État, je ne regarde pas mon voisin,
je me regarde dans le miroir.
Quand je pense à l'indépendance, je pense au jour 1, lorsque nous aurons fait le choix d'un pays et que nous serons
tous et toutes Québécois (à moins que le pays ne s'appelle pas Québec). Il est clair que nous devrons y arriver avec un projet commun, contenant des valeurs majoritairement communes. Du civisme à la gouvernance, c'est un nouveau système de valeurs communes que nous devrons situer et affirmer. Ce qui se passe en ce moment n'est que recherche de boucs émissaires, profilage de "mauvais néo-Québécois", et victimisation du peuple fondateur. Il n'y a pas de conflit, pas d'ennemi, pas de menace réelle, si ce n'est qu'un certain laxisme citoyen face à l'information .
Renart a malheureusement été piégé avec son billet intitulé
Notre langue molle, où il utilise deux extraits de Radio-Cadenas pour alimenter son indignation, extraits -on l'apprend plus tard- qui, pris dans leur ensemble, auraient plutôt pu alimenter son espoir. Il ne faut pas, en tant que blogueur, tomber dans ce genre de facilité. Laissons cela à ceux qui sont payés pour dire des conneries.
Pour inculquer un peu de connaissance réelle à mon ami, le Québec a le dernier mot sur tous les immigrants qui viennent. Ça s'appelle sélection Québec et on peut
ici faire le test pour déterminer si on a des chances d'être accepté. N'entre pas qui veut au Québec.
Deuxièmement, je vous invite à Télécharger le guide "
Apprendre le Québec", à l'intention des futurs et nouveaux arrivants. On peut y faire une évaluation plus éclairée de ce qui est montré par le Ministère.
Troisièmement, je rappelle à mon ami Renart et aux autres nationalistes tentés par le désir de trouver des boucs émissaires, que ce sont les Péquistes, avec André Boisclair au Ministère, qui ont mis la
chainsaw dans les programmes et organismes en francisation. Encore aujourd'hui, on francise les enfants mais pas les parents. Comment voulez-vous qu'il y ait une certaine cohésion dans l'intégration? D'autre part, il est difficile d'évaluer que le français soit menacé au Québec, puisque les études en ce sens se suivent et se contredisent. En ce qui concerne mon ami Renart, j'oserais dire que la source de ses frustrations, c'est de vivre dans un quartier très pauvre, et de faire l'expérience de la culture des exclus, ou l'anti-culture.
Ces immigrants, diplômés et qualifiés, qui ramassent les jobs de merde, qui vivent dans les taudis, qui gèlent l'hiver, qui livrent nos pizzas, qui font du 80 heures semaines pour nourrir plusieurs enfants, se font aussi chier dans la vie. L'heure n'est pas à chercher les coupables, mais à identifier un projet commun. Je parie 100$ avec quiconque que le jour ou le nombre de Québécois de souche souverainistes dépassera le nombre de (québécois de souche+ anglophones fédéralistes), énormément d'immigrants voteront OUI s'ils sont inclus dans le projet.
J'ai deux textes que je veux proposer à Renart et tous les autres "Saints Martyrs Québécois", textes qui , selon moi, remettent les choses en perspective. Si, après ces lectures, ils veulent poursuivre leur "dramatisation", j'aurai fait ce que j'ai pu.
L'un est une
entrevue du journal Voir avec l'avocat Julius Grey, qui explique très bien l'importance des accomodements raisonnables pour une intégration mieux réussie des immigrants.
L'autre est de Lysiane Gagnon, qui mériterait mon titre d'Humaine de la semaine, pour un texte d'une lucidité rafraîchissante par les temps qui courent. "La fausse crise" met le doigt sur le même bobo que moi, à savoir la montée en épingle par certains journalistes d'évènements futiles qui crée un débat de société potentiellement explosif, et des leaders qui (tiens tu m'étonnes) s'en lavent les mains.
Évitons de tomber dans un piège grossier. Nous valons mieux que ça.
Oh, et, by the way, l'occasion est tellement belle pour le PQ d'aller se chercher un peu de couleur pour les partielles de Bourget et Pointe aux trembles. Ça montrerait un peu l'exemple.