lundi 26 novembre 2007

La toile


Il est parfois intéressant de regarder de haut la vaste toile que constitue l'existence humaine. D'essayer de percevoir l'enchevêtrement complexe de fils tissés au cours de milliers, voire de millions d'années. Qu'un simple changement d'humeur de la part du plus petit d'entre nous peut avoir des conséquences catastrophiques ou au contraire, totalement merveilleuses.

Qu'en tenant compte des six degrés de séparation entre chaque être humain, mon humeur peut et va influencer celle de gens, qui se la transmettront, du facteur au chauffeur d'autobus en passant par l'animateur de lignes ouvertes. Il y a certainement des personnes insensibles à tout ce brouhaha, mais leur insensibilité ne sera pas sans affecter les gens autour d'elles. D'où l'importance de cultiver la vertu.

Je me suis amusé dernièrement à prendre conscience des réactions que pouvaient susciter les gens chez moi, et de la réaction en chaîne que cela pouvait causer. Quand je sers la boisson aux tables, j'ai droit à une panoplie d'interactions avec les gens. L'impatient grognon, le prétentieux à l'accent parisien, le solitaire au bar en quête d'amour, la légion d'indécis et les tribus, - ceux qui se déplacent en gros groupes, tentant de se faire une place dans les endroits restreints et déjà remplis-, tous me fournissent suffisamment d'éléments pour observer à petite échelle puis me transporter à plus grande échelle et prendre le pouls du monde. Chaque interaction crée le monde. D'abord par l'individu, puis l'interactions des individus en petits, puis en plus gros groupes, jusqu'au groupe planétaire, certains individus ayant plus ou moins d'influence sur un plus ou moins grand nombre d'individus.


Mais détrompez-vous. Même le plus petit d'entre nous, je le rappelle, a un potentiel infini d'influence. Le Québec se trouve dans la tourmente "ethnique" pour : 1) une vitre teintée 2)Un sandwich au jambon, 3)20 minutes de piscine 4) Un cours prénatal 5)Une rumeur sur le vote voilé et quelques autres futilités du genre. Ce qui ne veut pas dire que le débat ne devait pas avoir lieu. Simplement que la plus petite niaiserie, si elle trouve la bonne courroie de transmission et s'agglomère avec d'autres petites niaiseries, peut causer quelque chose de gros.

Imaginez vous, pendant quelques minutes, les conséquences possibles de chacun de vos gestes durant une journée. Votre sourire matinal a peut-être contaminé la journée de centaines, même de milliers de personne (par exemple si vous prenez le métro). Idem pour votre mauvaise humeur chronique. Pensez aux implications sociales des parfums horribles et envahissants dans un métro bondé à 8h le matin. Ou aux gestes touchants de beauté. Votre attitude a peut-être eu des répercussions jusque dans une salle de nouvelles, ou une salle de réunion du Ministère de la défense.

Je ne sais pas comment conclure ce billet. Je vais aller fumer.

jeudi 22 novembre 2007

Essai expérimental sur la pauvreté (quatrième partie)

Je sais, je sais, ce fut très, mais très long. D'abord, le travail, ensuite une vilaine bronchite, et puis un je ne sais quoi qui m'enlevait toute envie d'écrire (mon prochain billet en parlera plus à fond). Je devais quand même aller jusqu'au bout de cet essai. Il peut encore en sortir quelque chose de bon. Et j'aurai enfin couché l'ensemble de ma pensée sur la question.

Le complexe militaro-industriel de la pauvreté.

image provenant du site Theage.com.au

L'industrie de la pauvreté

La pauvreté est le terrain de bataille du complexe militaro industriel de la pauvreté. D'un côté, l'industrie de la pauvreté, c'est à dire les organismes charitables et leurs bailleurs de fonds, c'est à dire beaucoup de monde et surtout d'entreprises. Leur but, donner bonne conscience tout en occultant toute réelle possibilité d'éliminer ce qui leur est nécessaire, c'est à dire une masse de pauvres (environ 15% d'une population donnée) pour appliquer une pression continue à la baisse sur les salaires et les conditions de travail. L'industrie de la pauvreté, comme l'industrie "at large", dispose de beaucoup de moyens et de beaucoup de visibilité médiatique. Elle persiste à faire croire à la masse que les pauvres le sont par choix, sans égard aux principes physiologiques dont j'ai fait état dans mes billets précédents.


Photo provenant de www.csn.qc.ca

Les armées de la pauvreté


De l'autre côté, le complexe militaire de la pauvreté : les organismes de défense de droits. Ceux-ci détiennent aussi l'information et veulent la faire rayonner, mais, comme la gauche, à leur façon. Exit les vedettes; ce sont les pauvres eux-même qui doivent se libérer. Exit le glamour, la vérité doit être servie crue. Exit l'idée d'aller rassembler une masse critique de pauvres pour frapper la conscience collective, on se bat au compte-gouttes et toujours en réaction à de nouvelles politiques. On parle son propre langage plutôt que celui de la masse. Et on mène la lutte de la même façon qu'il y a quarante ans, malgré l'accumulation de défaites et de reculs.

Il faut dire que, des deux côtés du complexe militaro-industriel de la pauvreté, il y a des tonnes de gens qui deviendraient pauvres s'il n'y avait plus de pauvreté. Et des tonnes de gens qui digèreraient mal leur souper devant la réalité.

Et les pauvres, eux?

Pendant ce temps, les pauvres vivent littéralement aux portes de l'enfer. 1 an et demi à observer de haut au FCPASQ et 6 mois dans Hochelaga à côtoyer leur quotidien m'ont, tout d'abord donné mes premiers cheveux blancs, puis, fait prendre conscience que la réalité derrière les statistiques, déjà peu reluisantes, aurait pu me rendre fou tant elle était d'une inhumaine intensité.

Chaque jour, nos gouvernements infligent ou laissent subir à nos propres concitoyens des supplices physiques et psychologiques qui font que, si vous tombez à court de ressources financières, vous n'avez que quelques mois avant de commencer à souffrir de troubles mentaux et de maladies dont vous ne connaissiez même pas l'existence. Nos pauvres ne sont pas gras dûrs. Certes, il y en a. Mais je vous garantis sur ma tête que le pourcentage de riches qui usent de stratagèmes pour fourrer l'impôt est pas mal plus élevé que celui des assistés sociaux qui volent le gouvernement. Et Dieu sait que, dans un des deux cas, le faire constitue une situation de vie ou de mort. Et qu'un des deux groupes se pousse avec près du quart (sinon plus) du budget global de l'État Québécois. Pourtant, quand on parle de légiférer, lequel des deux groupes est celui qui écope?

La pauvreté entraîne la maladie. La maladie coûte cher à l'État. Le manque de formation coûte cher aussi. Mais, comme doivent penser certaines personnes, si on laisse les pauvres crever, tôt ou tard ils vont pogner quelque chose qui va nous contaminer. Alors on fait le minimum. Ça engorge le système de santé mais on trouve mille et une autres raisons de dire que le système est malade, de peur de déclencher une hystérie collective contre les pauvres, ou contre les riches eux-même. Quand on a besoin d'argent public, on prétend "serrer la vis", ça rassure le public mais ça tue des gens.

Nombre d'entre vous allez sûrement donner du temps, de l'argent ou des denrées pour les paniers de Noël ou le Club des petits déjeûners lors des prochaines semaines. Peut-être le faites vous régulièrement. Je ne vous dis pas de ne pas le faire, comme j'aurais pu il y a quelques années. Simplement que vous sachiez ceci : quand vous le faites, l'État se retire un peu plus de l'assistance immédiate aux pauvres. Certes, il y aura soulagement immédiat de la faim, de la solitude, mais l'année qui suit va être plus rude. Alors à qui la charité fait le plus de bien?

En terminant, amusez-vous:

JE TOMBE SU'L BS!
basé sur un jeu créé par le Collectif pour un Québec sans pauvreté

Vous tombez sur le BS, là, comme ça, dans la situation dans laquelle vous êtes. On vous donne 550$ le premier du mois et vous avez le droit de gagner 200$ dans votre mois. Il n'y a plus de job dans votre domaine et votre garde manger est vide (je vous laisse les condiments), pas de marge ou carte de crédit. Vous êtes un vrai pauvre.

Postez moi un commentaire dans lequel vous me donnez, grosso-modo, votre budget quotidien sur le modèle suivant.

1er : 400$ loyer, 75$ hydro, 30$ épicerie (505$), reste 50$
2: 25$ téléphone, reste 25$

et ainsi de suite.

Voyez combien de jours, avec vos obligations actuelles, vous pourriez survivre.


La suite, éventuellement...

Quête de sens.

Je suis entré dans une drôle de période. Soudainement, j'ai eu la vive impression que ce dont j'étais témoin, dans notre monde, dans la société, la blogosphère, n'était qu'un simulâcre d'opéra savon. Un soap qui se prolonge depuis des millénaires, voire même des millions d'années.

Guerres, dominants-dominés, idéologies, brebisme (sic), oppression, misère, oeillères, voilà le quotidien humain depuis toujours. Certes, il y a de très belles choses qui se passent parmi nous, il y en a toujours eu. Des gouttes dans l'océan, pourtant.

Avez-vous parfois cette impression que, de nos jours, le Diable a pas mal plus d'avocats que les autres? Moi, si. Ça me gossait sérieusement, intérieurement, de voir les grands jouer à la victime et les petits passer pour les méchants. Comme dans la toune.

J'ai cherché du sens à travers la défense des autres, une certaine critique du monde, à travers l'espace politique; tout ce que j'y ai trouvé n'est que déception et frustration.

Il y a de cela quelques mois, je réfléchissais à la possibilité pour moi de n'accorder aucune importance à la bêtise humaine, à la merde qu'elle crée. Ça n'a pas été possible. Je suis vite retombé dans le piège du quotidien mal foutu de l'humanité. Accomodements raisonnables, jeunesses Adéquiennes (merci Chapleau), gouvernements pourris et électeurs tout aussi pourris. J'ai tenté de comprendre, de trouver, en vain, un sens à tout cela.

Je n'arrivais même plus à écrire, faute de sens.

Hier, on m'a suggéré un exercice à faire pendant quelques semaines. Cesser de chercher un sens, arriver même à croire qu'il n'y en a pas. Faire le vide de sens et avancer dans la vie sans ce questionnement incessant.

Observer, simplement, les Adéquistes faire l'illustration de ce que nous avons déjà été il y a quelques millions d'années, le PQ s'empêtrer dans sa recherche du pouvoir, le peuple tiraillé et diverti de toutes parts pour qu'il ne puisse se poser des questions plus pertinentes que "le temps qu'il fera demain" ou "condamnerons nous un politicien pour sa corruption passée alors que la corruption pourrit encore tous les niveaux de gouvernements?", ou "qui va rester dans le Loft?"etc.

Observer et m'abstenir d'y chercher un sens.

Je disais dernièrement que puisque Caillé se présentait pour l'ADQ dans le comté de Bourget, j'offrirais mes services au Parti Québécois pour lui faire la lutte. Eh bien, je l'ai fait. J'ai pris contact avec quelques personnes ayant accès au bureau de la Cheffe pour leur faire part de mon intérêt, puis j'ai appris par les médias que Maka Kotto serait l'homme de la situation. Ça me va. Comme je l'avais dit à mon entourage, la politique m'a toujours intéressé, mais je ne veux pas avoir à jouer la game sale pour y entrer. Ça ne m'intéresse pas assez. J'ai toujours privilégié mon intégrité avant le pouvoir. Voilà, c'était la mise à jour pour ceux qui avaient lu mon billet intitulé "le rejet". Pas d'amertume, rien qu'un sentiment de légèreté.

Ainsi, je me lance en quête de non-sens. Ça fait déjà deux jours que je m'y consacre sérieusement, et la vie est drôlement plus rigolote. Je me sens comme un petit vieux assis sur son balcon qui regarde la télé d'aujourd'hui avec son vieux poste noir et blanc des années 60 et qui se dit tout haut : ça n'a pas de sens. Et il rit.

C'est un bel exercice de table rase. Qui, selon mes conseillers, devrait m'éclairer sur la suite des choses en ce qui me concerne. Sortir de ma tête ne peut pas me faire de tort. Ça va sûrement faire des billets intéressants.

Suggestion musique : Blonde Redhead, album "23".